
- Scénario
- Graphisme
Virtus, le sang des gladiateurs – tomes 3 et 4 de Gibbon et Hideo Shinanogawa
Et si Virtus n’était pas que du bourrin !?
Virtus, le sang des gladiateurs est un seinen au concept de base intéressant. A savoir plonger des prisonniers, dont un redoutable judoka, dans une Rome Antique pour les faire devenir gladiateur. Mais à la différence d’un Thermae Romae, l’aspect historique est complètement laissé de coté, pour faire place à un titre violent, bourrin mais pas dénué d’intérêt.
Mais il manquait quand même un fond plus dense, quelque chose permettant de passer outre l’aspect primaire de cette violence.
Trouvera-t-on cela dans ces 3ème et 4ème opus ?
Virtus, le sang des gladiateurs – tomes 3 et 4 de Gibbon et Hideo Shinanogawa sont édités par Ki-oon et sont disponibles à la vente, respectivement, depuis le 15 novembre 2012 et le 24 janvier 2013
Résumé de Virtus 3 et 4
Résumé du tome 4 par l’éditeur :
Après s’être attiré les foudres d’un des gladiateurs de l’île en prenant la défense de Kamio, Aizawa pénètre dans la chambre d’Aquilia afin de se venger. Pour punir cet affront, la fille du laniste organise un duel… Voilà le jeune homme obligé de se battre contre Kurukis, qui compte bien en profiter pour se débarrasser définitivement de son adversaire !
Mais l’ancien prisonnier japonais a plus d’un tour dans son sac : mis au tapis et roué de coups, il joue le tout pour le tout…
Une plongée dans la décadence de Rome, entre tyrannie, dépravation et barbarie, sur les pas des gladiateurs de Spartacus.
Pancrace et complots
Virtus est un titre assez étrange qui mixe les influences et époques tout en proposant de l’action décomplexée. Mais l’histoire était handicapée par des rebondissements trop gros, des personnages manquant de profondeur et un graphisme particulier.
Or ces points vont globalement s’atténuer dans ces deux opus, pour arriver à un tome 4 qui élève le niveau de ce seinen.
Le troisième volet de Virtus est presque entièrement dédiée à l’action, entre des combats, des entraînements et quelques scènes de la vie de tous les jours d’un gladiateur. Soit dit en passant, le terme gladiateur est un peu galvaudé ici, puisque les différents personnages combattant n’utilisent pas d’arme. Il peaufine leur art martial. Refermons ce petit aparté.
Dès les premières pages de ce volume, un combat intéressant à déjà lieu. Ce dernier met en avant le pancrace et les fondements de la lutte libre. Ainsi, l’opposant de Narumiya maîtrise à la perfection différentes prises, soumissions, et autre technique au sol.
On sent chez les mangakas une vraie volonté de nous présenter cet art martial millénaire, qu’ils apprécient, lointain ancêtre du free fight et autre sport de ce genre. Le combat est fluide, même si l’on ressent trop ce besoin de glorifier le pancrace.
La suite va délaisser un peu le judoka au physique imposant, pour mettre sur le devant de la scène le chétif Kamio, puis le yakuza Aizawa. Le premier va vouloir ne plus être un poids pour les autres et va rechercher à devenir plus fort. Ce qui ne sera pas une mince affaire, surtout quand les autres gladiateurs s’en prennent à lui. Et c’est à partir de ce moment là qu’intervient l’insaisissable Aizawa. Ce yakusa dévoile une personnalité très appréciable, plus nuancée qu’il n’y parait. Son comportement imprévisible est source de nombreux problèmes mais permet de rendre la lecture palpitante. Ce personnage charismatique accroche le lecteur et son attention. On se plait à suivre ses combats et entraînements. Malheureusement, même si j’aime beaucoup la mise en avant du japonais tatoué, j’ai plus de mal avec certaines grosses ficelles utilisées. Par exemple, je ne crois pas une seconde à son comportement presque altruiste. Mais Aizawa reste un des personnages les plus travaillé et intéressant.
On voit bien que Gibbon et Hideo Shinanogawa essaient de faire mûrir Kamio et de le faire évoluer. Mais pour l’instant cette tentative est maladroite.
En plus de l’action, on voit également comment est la vie au jour le jour dans ce camp d’entrainement, même si on peut douter de la véracité historique des faits. On voit également apparaître des débuts de tension, de rivalités, voir de tentatives de séduction assez prometteurs pour la suite.
Cela densifie un peu l’univers et laisse apparaître quelques pistes pour la suite. Il ne faut également pas occulter l’aspect purement divertissant avec ses nombreux combats, cette violence permanente et un peu de fanservice avec la pulpeuse Aquilia.
Néanmoins ce troisième volet reste dans la veine des deux premiers avec une amélioration visible. Mais c’est vraiment le tome 4 qui réhausse le niveau de ce Virtus.
En effet, ce dernier, non content de fournir sa dose de gore et d’action, propose aussi des développements de personnages et surtout des intrigues politiques. Virtus, que l’on pensait finalement assez primaire, se dote d’un fond plus consistant. En gros, il y a deux phases, liées à deux endroits. La première se déroule sur l’île où s’entraîne nos héros, et la deuxième a lieu à Rome où des sénateurs fomentent l’assassinat de Commode.
Dans une première partie on voit la fin du combat du yakuza Aizawa contre un gladiateur, Kurukis qui a personnellement envie d’en découdre avec lui. Cet affrontement se finit de façon surprenante mais néanmoins violente. Notamment via une scène assez trash. Ce dénouement fera encore plus prendre conscience au frêle Kamio qu’il doit devenir plus fort. Après une ellipse, on retrouvera nos japonais du futur quelques mois après, plus entraînés que jamais.
On en apprendra également plus sur le passé de Narumiya et surtout sur son père, tendance psychopathe. Le portrait dépeint de ce père frise le ridicule tant ce n’est pas crédible. Mais il a le mérite de mieux comprendre pourquoi notre judoka au grand coeur en est venu à le tuer, mais aussi et surtout cela nous donne plus d’information sur l’énigmatique vieux de la bande. On s’en doutait, mais cela se vérifie ici. Les éléments se mettent en place pour amorcer le dernier tome de cette série.
Surtout que dans la dernière partie, on délaisse un peu les gladiateurs et les combats pour se concentrer un peu plus sur Commode, Rome et le Sénat. Même si on est à des lieux de la réalité ou du souci de véracité d’un Thermae Romae, par exemple, cette dimension politique est vraiment intéressante. Elle permet de donner plus de consistance à ce seinen et de casser l’image un peu barbare et régressif de ce titre, sans en enlever l’aspect distrayant. La mise en place de la tentative d’assassinat des sénateurs est intéressante à suivre et promet de belles choses pour la suite.
Graphiquement, jai trouvé qu’il y avait aussi du mieux. Le découpage et la lisibilité sont plus que correctes, et le travail sur les décors et détails bien présents. Mais, je ne sais pas si c’est par accoutumance ou parce qu’il s’améliore, mais j’ai trouvé le trait de Hideo Shinanogawa, certes toujours spécial, mais plus maîtrisé notamment dans les personnages et leurs proportions.
Pour conclure, Virtus, le sang des gladiateurs – tomes 3 et 4 de Gibbon et Hideo Shinanogawa relèvent le niveau de Virtus, spécialement le tome 4. Ce seinen conserve ce qui faisait le charme des deux premiers volumes, le coté bourrin, un peu régressif, le gore, l’action, l’apologie des arts martiaux, et l’idée de base, mais tout en atténuant, un peu, certains défauts. Ainsi, les personnages secondaires sont mieux exploités, même si le héros est trop secondaire à mon goût, c’est un peu moins grossier dans les évènements et leur traitement (sauf le coup du père de Narumiya) et le dessin plus agréable. Mais surtout, des intrigues politiques viennent se rajouter à tout ça, rendant le tout plus palpitant. On en regretterait presque que ce mini-virage n’est pas été abordé plus tôt.
En tout cas, j’ai hâte de lire la fin de cette série, au prochain opus. Peut-être aura-t-on l’explication sur le pourquoi ils n’utilisent jamais d’armes pour des gladiateurs et peut-être que les mangakas utiliseront le fait que les héros viennent d’un Japon moderne. Parce que pour le moment, on ne comprend pas bien l’intérêt du tour de passe-passe initial.
En tout cas vu le virage amorcé, Virtus quitte la case « manga violent et de combat » pour proposer quelque chose de plus vaste et profond. Pour juger Virtus, il va donc falloir attendre la conclusion de la série, qui peut nous réserver de belles choses.
Et vous qu’avez-vous pensé de ces deux tomes ? Trouver-vous aussi que le volume 4 apporte de réelles choses en plus, rendant le titre plus intéressant ?
Je n’avais pas du tout entendu parler de ce titre et si c’est bien violent ça ne pourra que me plaire. J’ai de la chance, je ne suis pas trop en retard vu qu’on en est qu’au tome 3 et 4, je vais prendre tout ça depuis le début et apprécier j’espère 🙂