
Thinking Eternity de Raphaël Granier de Cassagnac.
Retour à la SF.
Dans mes résolutions de l’année dernière je m’étais mis en tête de lire plus de SF, ce que je n’ai finalement pas fait… Mais je vais essayer de me rattraper.
Sorti en août 2014, Thinking Eternity est un roman du Français Raphaël Granier de Cassagnac.
En plus d’écrire, ce dernier est directeur de la collection Ourobores chez Mnémos et chercheur en physique des particules (je ne sais pas exactement en quoi ça consiste, mais ça fait bien sur un CV).
Ce que je ne savais pas, mais je le découvre en cherchant des informations pour rédiger ces quelques lignes, c’est que Thinking Eternity est un préquel à Eternity Incorporated (sorti en 2011), et ça tombe bien car j’avais très envie de lire la suite du roman.
Evidemment, ce roman est édité chez Mnemos.
Résumé de Thinking Eternity chez Mnemos.
Adrian Eckard, biologiste de talent, réchappe à un attentat de dimension planétaire en perdant la vue. Bénéficiaire de la première greffe cybernétique oculaire mais bouleversé par l’évènement, il quitte tout pour parcourir le monde et enseigner la science la plus fondamentale dans les endroits les plus reculés. Humble et charismatique, soutenu par des compagnons convaincus, il fonde un mouvement mondial, le thinking, qui rencontre un succès foudroyant et bientôt, le dépasse. Pour le meilleur comme pour le pire…
Sa soeur Diane, neuro-informaticienne de génie, est au même moment recrutée par Eternity Incorporated, entreprise philanthropique vouée à la survie de l’espèce humaine par-delà d’hypothétiques catastrophes en tout genre. Elle y développe les premières consciences artificielles destinées à oeuvrer pour notre bien. À moins qu’elles ne finissent par nous remplacer…
Dans un monde en proie aux questions brûlantes des dernières découvertes scientifiques, Thinking Eternity est à la fois un thriller haletant, une enquête journalistique et une anticipation visionnaire qui nous montre en direct la marche de l’humanité vers sa singularité, ce moment-clé où les capacités technologiques dépasseront l’être humain. Pour l’éternité ?
SF ancrée dans notre époque.
J’avais beaucoup aimé La Fille Automate de Paolo Bacigalupi pour les sujets actuels qu’il abordait. Thinking Eternity traite quant à lui des sujets actuels qui me passionnent le plus.
Si je me suis intéressé dans un premier temps à ce roman, c’est parce qu’il semblait traité de transhumanisme, et je trouve la question passionnante. Mais Raphaël Granier de Cassagnac développe ici également de nombreux autres thèmes au moins aussi passionnant.
Je reviendrai sur les thèmes abordés, mais j’aimerai dans un premier temps vous parler de la forme du roman, afin d’évacuer ce point.
Le roman est raconté sous la forme de récits de certains personnages, avec en alternance des interviews et ce qui semble être des articles de presse. Si je me suis demandé pendant un petit moment l’intérêt de cette forme, elle est finalement tout à fait justifiée dans le roman. Le style de Raphaël Granier de Cassagnac est simple mais efficace. Et la lecture sans être remarquable par sa forme est très agréable.
Quant à l’histoire en elle-même, elle met beaucoup de temps, à mon sens, à se développer. Pendant les deux tiers du roman, je me suis demandé si son auteur n’avait pas en tête de nous dépeindre un possible monde futur, une vision espérée? En tout état de cause ce n’est pas une critique tant j’apprécie le “word building”, mais cet exercice de style ne plait pas forcément à tout le monde, et n’était que peu cohérent avec la forme du roman suivant l’histoire de plusieurs individus liés entre eux. Finalement le roman s’accélère sur son dernier tiers, et l’histoire rattrape le monde mis en place précédemment, pour débouler sur une conclusion de qualité.
Revenons aux idées développées dans ce roman.
En premier lieu, le roman traite du transhumanisme. Pour les profanes, le transhumanisme, est l’augmentation du corps par les technologies. Par exemple, le protagoniste du roman, suite à un attentat se retrouve aveugle, et sera le premier à bénéficier de prothèses oculaires. Les questions sous-jacentes au transhumanisme sont passionnantes, notamment sur le plan de l’éthique.
Pensez-y, si vous aviez le choix, remplaceriez-vous vos yeux par des “yeux bioniques” qui vous permettraient de voir dans le noir, de zoomer à plusieurs centaines de mètres, ou de voir à travers les vêtements. Reposez-vous la question, si jamais vous deveniez aveugle, est-ce que votre réponse serait la même? Et dans ce cas, prendriez-vous une prothèse oculaire ne vous proposant que de re-voir normalement, ou prendriez-vous la version “vision de super héros”.
Bref, le roman traite de cette problématique, mais finalement n’en fait pas non plus trois tonnes, au contraire, il l’intègre de manière concrète et très pertinente dans son univers.
La seconde problématique développée ici est celle de l’émergence des intelligences artificielles. Ce sujet est d’autant plus d’actualité depuis que Stephen Hawking et Elon Musk (Patron de Tesla et Space X) ont fait part de leur peur de l’émergence de telles intelligences. Sur ce point, j’ai un seul regret, le roman expose l’impossibilité qu’une telle intelligence ne puisse ressentir des émotions via l’intervention d’un chercheur et de son théorème « magique ». J’aurais aimé plus de développement sur ce point.
Enfin, le roman propose l’idée du développement et de la transmission du savoir. Il traite du fait que le savoir scientifique pourrait être une alternative aux religions. Pourquoi croire encore en Dieu alors que la science a démontré que les différents cultes ont eu tort sur différents points. Alors que la religion a été exportée dans les contrées les plus pauvres du monde, pourquoi le savoir scientifique n’y aurait-il pas sa place. Je trouve cette partie passionnante. Les outils proposés pour développer le savoir sont pertinents et en rapport avec les technologies actuelles.
Enfin, à travers cet apprentissage des sciences et des technologies, apparaît de manière sous-jacente la question de savoir qui comprend encore les objets que nous utilisons tous les jours. En cas de drame à l’échelle mondiale, comment l’humanité pourrait-elle renaitre?
La place de l’homme vis-à-vis des technologies et du divin est une question passionnante, importante et ici traité avec pertinence.
Pour conclure, je ne suis pas sûre d’être complètement objectif avec cet ouvrage, tant les questions qu’il aborde me passionnent. En tout état de cause, je ne peux que vous le conseiller vivement, ce n’est peut-être pas en sa forme l’objet littéraire le plus abouti, mais certainement un des textes les plus ancré dans son époque que j’ai pu lire. Il pose des questions importantes, et essai d’y répondre avec pertinence. Le monde et les technologies ont évoluées, mais est-ce également les cas des hommes? C’est à cette question que ce roman essaie de répondre, ou du moins essaie de vous faire réfléchir.
Avez-vous lu ce roman? Qu’en avez-vous pensé?
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