. Pluto – tome 1 de Naoki Urasawa | Fant'asie
Kameyoko 29/04/2010 12

Pluto – tome 1 de Naoki Urasawa d’après Osamu Tezuka

D’après une histoire d’Astro Boy

Pluto est peut être le manga le plus attendu de ce premier semestre 2010. Forcément quand on associe les noms de Naoki Urasawa et Osamu Tezuka, on est en droit d’espérer le meilleur.

Pluto est donc le nouveau manga de l’auteur des renommés Monster, 20th Century Boys d’après une histoire d’Astro Boy : « Le robot le plus fort du monde » créée par Osamu Tezuka, dieu du manga.

Sorti en 2003 à l’occasion de l’anniversaire fictif d’Astro Boy (né en avril 2003 dans le récit), et publié par l’éditeur Shôgakukan. Il aura donc fallu attendre 7 ans pour voir débarquer ce titre en France chez Kana.

Connaissant le talent de ces deux grands messieurs, inutile de dire que l’attente est grande.

Résumé de Pluto 1 chez Kana

Un incendie ravage les montagnes suisses. Après avoir maitrisé le feu, les pompiers retrouveront les restes du robot Mont-Blanc attaché à l’administration suisse des eaux et des forêts, apprécié et connu de tous.

Gesicht, agent d’Europol est un robot inspecteur. Il enquête actuellement sur le meurtre d’un humain : Bernard Lanke, retrouvé mort dans une mise en scène macabre avec de curieuses cornes représentées sur sa tête.

Plus tard, ses supérieurs lui confieront l’enquête de la destruction de Mont-Blanc. En regardant les photos de la scène de crimes, il verra que la mise en scène est similaire à celle de Lanke. Lui aussi à des cornes.

Petit à petit il en viendra à penser que les 7 plus puissants robots de la planète, ayant participés au conflit d’Asie du Centre sont menacés.

Un thriller dans le monde d’Astro Boy

Pluto est donc tiré d’une histoire d’Astro Boy signée Tezuka. Compte tenu des styles des deux mangakas, cela pouvait faire peur si Urasawa s’était contenté de reprendre l’histoire. En effet, son style est plus dans des psychologies poussées, des thrillers étudiés contrairement à son illustre ainé, qui, lui, a un style plus enfantin et orienté sur l’action.

Je peux d’ores et déjà dissipé tous les doutes. Non, Urasawa ne se contente pas de reprendre une histoire, il l’adapte et la personnalise en un thriller mêlant robots et humains.

Petit à petit, le récit tombe dans un polar mettant en scène des crimes en série sur des robots très développés, avec en parallèle des meurtres d’humains liés à la condition des robots.

La narration est proche de la perfection. Dès les premières pages, le lecteur est happé dans ce récit sombre, complexe avec ses nombreux rebondissements et avec une maitrise proche de la perfection du sujet.Tout s’installe progressivement, l’intrigue prend de l’importance au fur et à mesure que l’on tourne les pages, bout par bout. Le mangaka sait entrainer son lecteur sur différentes pistes, différents détours pour mieux revenir sur l’intrigue principale.

Très rapidement on s’interroge sur les raisons de ces crimes, l’identité du tueur (humain ou robot), la prochaine victime et sur les révélations liées à ces robots.

Naoki Urasawa s’approprie l’univers et les personnages mais les mélange à sa sauce et en fait plus un spin-off qu’une reprise. Son empreinte est indéniable.

L’atmosphère futuriste de ce titre joue pour beaucoup dans l’excellente impression que laisse ce titre. On retrouve un peu de la vision de Tezuka avec ces grands bâtiments futuristes, les voitures volantes, les robots du quotidien…. Cette vision est assez classique de la vision du future d’une certaine époque.

De même, les robots sont très présents dans leur vie de tous les jours, avec divers degrés de sophistication. Ils ont des droits et sont très proche d’être humain. Comme dans l’œuvre de Philip K. Dick : Blade Runner (ou le vrai titre Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques?), on s’interroge vraiment sur qui est un robot ou pas, et surtout qu’est-ce qui différencie un robot d’un être humain? Car quelqu’uns de ces androïdes sont presque empathiques et peuvent même s’émouvoir de choses belles. Certains forment même des foyers avec femmes et enfants (comment ils font, c’est une autre histoire ^^)

L’influence d’Asimov et ses trois lois de la robotique est plus que présente. Ces robots n’ont pas le droit de faire du mal à un humain.

Donc au-delà de l’enquête policière, on retrouve bien les grandes thématiques de la SF de l’époque de Tezuka. Tout ça donne une vraie profondeur à Pluto, qui est non seulement un superbe polar, très bien scénarisé, mais aussi un excellent manga de science fiction, un peu retro.

Ce titre n’en finit pas de nous surprendre agréablement. Au-delà de son scénario, son ambiance, ses personnages sont aussi très détaillés.
Le mangaka propose une psychologie poussée pour ses personnages. Le fait de rajouter des robots capables presque d’empathie donne encore plus de profondeur et de nuance à ces protagonistes. L’auteur s’amusant même à ne pas dire qui est robot ou humain. Il laisse un peu mariner le lecteur qui est bien à la peine pour affirmer si c’est un androïde ou pas. On est donc loin de la vision de robots fabriqués à la chaine, identiques et sans intelligence (artificielle). Ils reproduisent le comportement humain, s’intègrent parfaitement, fondent des familles et sont capables de ressentir certaines émotions. C’est en cela qu’on sent l’influence d’un Philip K. Dick.

Il y a notamment un superbe passage avec le robot North-2 et son rapport à la musique et à son passé. Brando n’est pas en reste non plus dans son rapport à la famille.

Vous l’aurez compris, les personnages sont passionnants et on s’attache vite à eux.

Le petit bonus est la présence du très attendu Astro Boy à la toute fin, qui est loin de nos souvenirs et de la représentation de Tezuka.

Le trait est superbe, avec notamment un soin tout particulier apporté aux décors qui sont juste superbes. Les visages sont très expressifs et permettent de vite identifier un personnage. L’utilisation du tramage est parfaitement gérée et ne se remarque pas. La mise en scène est bonne pour un polar, un thriller mais manque de dynamisme dans les scènes d’actions. Ce qui n’est pas grave en soi, puisque Urasawa a tendance à les suggérer plutôt qu’à les dessiner.

L’édition de Kana est du très beau boulot. La sur-jaquette est superbe avec cette texture un peu rugueuse. Il y a également des premières pages en couleur très belles, qui jouent beaucoup sur les dégradés d’orange.

Le papier, l’encrage sont de bonne facture. Rien à redire dessus. L’édition est à la hauteur de ce titre.

Pour conclure, il aura fallu 7 ans pour que ce titre soit disponible en France. L’attente aura été longue mais elle est récompensée. Pluto satisfait pleinement les attentes placées en lui. C’est tout simplement excellent, un de mes coups de coeur de cette année. Son ambiance, son scénario, ses personnages sont proches de la perfection. Très vite le titre devient addictif, on ne veut qu’une chose : la suite. Les intrigues sont nombreuses, les possibilités infinies, un suspens présent et différents niveaux de lectures (pour passionné de thriller ou de SF).

Pluto a tout pour devenir une œuvre incontournable et culte. Reste à ne pas décevoir ensuite.

Tezuka serait probablement très fier de cette reprise. Naoki Urazawa rejoint Tezuka au panthéon des meilleurs mangakas.

Et vous, partagez-vous mon enthousiasme? Trouvez-vous qu’Urasawa ait réussi à apposer sa griffe? Peut-on dire que c’est un coup de coeur 2010?

12 commentaires »

  1. Bagooor 29/04/2010 at 10:47 -

    J’ai vraiment adoré.
    C’est bien dessiné, bien raconté, très tourné SF et proche de ce que l’on connait déjà sur les robots (lois de la robotique, émotions des robots, etc…).

    Certains lui reprochent son manque d’innovation, mais cela reste une excellente lecture

  2. locogitatio 29/04/2010 at 20:22 -

    J’ai lu les deux premier (en attendant d’acheter le T3) et je dois dire que c’est un véritable régal si on aime Naoki Urasawa (cf mon article) et son style particulier.

    Par contre un gros carton rouge à toi pour spoiler la fin du Tome 1, c’est lamentable….ça évite la surprise de la découverte qui est si bien amenée ( ceux qui l’on lu me comprendront).

  3. Toros 29/04/2010 at 21:19 -

    Merci pour l’article…

    Tu réponds du coup à mon tweet d’il y a quelques semaines…

    Je vais donc me laisser tenter !

  4. Toros 29/04/2010 at 21:25 -

    En fait, je viens de commander les 3 premiers pour ma copine en version UK, et je lui volerais plus tard…

    Je sais pas où en est la sortie en France, mais pour ceux que ça intéresse, y a les 7 premiers tomes de dispo sur amazon uk…

    C’est aucunement de la pub… Je n’ai aucun lien avec amazon,si ce n’est qu’il possède ma CB…

  5. Lu-sama 29/04/2010 at 21:28 -

    T’as tout dit, t’es pas drôle. ^^ »
    Du grand Urasawa comme on en a l’habitude, à la différence que les 8 tomes seront peut-être mieux gérés que ses précédentes longues séries.
    J’étais un peu rebutée au début par l’aspect « Tezuka » de l’œuvre, je suis loin d’être fan d’Astro et l’univers de son créateur ne m’a jamais fait accrocher, mais avec Urasawa c’est quand même autre chose. Le style (aussi bien graphique que scénaristique) est plus mature et captive plus facilement le lecture plus âgé.
    L’émotion est là elle aussi et l’histoire de North-2 est tout simplement magnifique.
    La grosse série de ce début 2010.

  6. Kameyoko 30/04/2010 at 11:20 -

    @Bagooor : Effectivement, c’est classique niveau SF proche d’un Dick et Asimov, mais ç’est quand même excellent.

    J’ai du mal à comprendre qu’on lui reproche son manque d’innovation. Forcément quand on part d’une histoire existante, on peut pas trop non plus faire tout et n’importe quoi. Pour moi, il s’approprie très bien le titre.

    @Locogitatio : Je fais attention à éviter de spoiler. Là, pour moi c’est pas un spiil, parce que ça ne dévoile pas des moments clés de l’intrigue. Surtout que là, on sait, de par le sujet, qu’on y aura droit.

    Mais effectivement, j’aurai pu me passer de cette phrase.

    @Toros : Je ne vois pas comment on ne peut pas apprécier cette série. Donc pour moi, tu peux y aller les yeux fermés. En France, le tome 3 est sorti ce mois-ci. Le prochain devrait être en juillet.

    @Lu-Sama : Le problème avec Tezuka c’est que ce n’est pas récent. Et donc ce manque de modernisme se ressent dans le dessin et la narration. Mais je trouve que c’est quand même très bon.

    C’est clair que Pluto est plus mature qu’Astro Boy, mais la volonté de base n’est pas la même. Effectivement Pluto est plus adressé à un lectorat agé, contrairement à Astro Boy.

    Et dire qu’on a mis 7 ans pour avoir ce titre!

  7. locogitatio 30/04/2010 at 11:36 -

    Oui ce n’est pas un spoil à proprement parler dans le sens où ça ne révèle rien concernant des passages clés de l’histoire mais je pense que tu as très bien compris ce que je voulais dire. Tu gâches simplement la surprise du lecteur, comme tu le dis si bien la narration est excellent et la façon dont est amenée la rencontre avec Astro est faite pour surprendre le lecteur, et de ce fait tu casses cette narration.

    Quel est l’intérêt de cela ou de celui de raconter presque tout ce qu’il se passe dans un seul tome d’une série en guise de chronique (pas le cas ici) ? Ou alors c’est réservé exclusivement à ceux qui l’ont lu, dans ce cas faut le préciser ( peut importe de ce que je pense de la chose).

    Voilà j’espère ne pas m’être montré un peu trop agressif mais je suis assez strict sur ce genre de chose et j’oublie pas non plus que ça pourrait m’arriver ^^;

  8. Kameyoko 04/05/2010 at 09:29 -

    @Locogitatio : Le but premier des articles sur Fant’asie, est de donner envie ou pas de lire l’oeuvre en question.

    Généralement, le spoil est évité mais il faut des fois donner envie de lire, donc la frontière est parfois ténue.

    Alors oui dans ce cas, j’ai peut être franchi la ligne (et encore ça se discute 😈 ).

    Je te rassure tu n’es pas du tout agressif. La critique est bonne à prendre

  9. Bagooor 04/05/2010 at 10:16 -

    @Locogitatio et Kameyoko : En fait ici, ce n’est pas le fait d’apprendre que l’on rencontre Astro qui peut poser probleme (on sait tous que Pluto est une adaptation d’une histoire d’Astro…), mais bien la manière dont c’est amené (c’est un peu ce que tout le monde attendait, de voir comment Astro allait être introduit, et à quoi il ressemblerait).
    Kameyoko mentionne bien le fait qu’Astro apparait à la fin du volume, mais pas comment il est amené. Je pense que c’est quand même à moitié un spoil, mais qu’il y a pire comme révélation.

    Mais je comprend Kameyoko, car il est difficile de donner un résumé de l’histoire sans aborder certains éléments importants. J’ai le même souci lorsque je fais les résumé et que je me base sur un élément pour une critique 🙂

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