. Black Summer de Warren Ellis et Juan Jose Ryp | Fant'asie
Kameyoko 15/06/2010 9

Black Summer de Warren Ellis et Juan Jose Ryp

Le comic de super-héros selon Milady

Milady Graphics est un petit nouveau dans le monde de l’édition de comics. Pourtant, malgré un catalogue assez restreint (en terme de références), il possède de très bons titres : Le Dernier des Templiers, Scott Pilgrim, Empowered, King City et ce Black Summer, qui vaut le détour.

Avec Warren Ellis (The Authority, Planetary …) au scénario et Juan Jose Ryp au dessin, Black Summer a été édité, aux USA, chez Avatar Press en 2007.

En France, il est disponible depuis novembre 2009 et est édité par Milady Graphics


Résumé de Black Summer

3 juillet 2006, une conférence de presse à la Maison Blanche est prévue dans quelques minutes et où le président des Etats-Unis répondra à quelques questions. L’évènement est retransmis en direct par les médias.
En attendant le début de la conférence, les journalistes révèlent avoir vu John Horus, membre populaire et respecté des « Sept Armes » sur la pelouse.

La conférence est sur le point de débuter sauf que ce n’est pas le président qui se présente mais un John Horus couvert de sang. Il prend place devant le pupitre et annonce qu’il a tué le président et les conseillers présents dans le bureau ovale. Mais pour lui c’est un acte patriotique. Il accuse cette administration de corruption, d’avoir volé les dernières élections, d’avoir menti à propos de la guerre en Irak et qu’à cause d’elle, le peuple n’est pas libre. Il demande à ce que de nouvelles élections est lieues.
Tom Noir, un ancien membre des Sept Armes, buvant beaucoup, assiste médusé à cette scène. Quelques minutes après, quelqu’un frappe à sa porte. Il tombe nez à nez avec Frank Blacksmith, sensé être mort depuis de nombreuses années. Cet homme est le créateur des Sept Armes. Pourtant, il est venu pour éliminer Tom.

Quand on combat pour le Bien, jusqu’où peut-on aller?

Dans les comics, s’il y a un courant majeur c’est bien celui des super-héros, dominé par les mastodontes que ce sont les personnages du Marvelverse ou du DC Universe. Pourtant les super-héros envahissent aussi les éditeurs moins importants et sur des titres moins long et mainstream comme Invinsible, Incognito, Irrécupérable, Dynamo 5

On constate aussi depuis quelques années, une désacralisation de ses sur-hommes, où ils apparaissent de plus en plus humains, avec des faiblesses. Ils sont moins clichés et sont moins manichéens. Le super-héros devient de plus en plus complexe et profond, même si le maître reste Watchmen.

Black Summer fait partie de ces comics qui vont plus loin qu’une simple histoire de super-héros.

Même si ce titre tient dans cet unique volume, il se révèle très intelligent, profond et surtout engagé.

Tout débute par une conférence de presse où John Horus, membre le plus connu et le plus apprécié des « Sept Armes » annonce avoir tué volontairement le président des États-Unis et ses conseillers, pour le bien de tous. Il accuse l’administration en place de mensonges, corruption et d’être responsable de beaucoup de faits (Guerre en Irak, attentats du 11 septembre).

Là, il ne faut pas sortir de Saint-Cyr pour voir clairement une critique acerbe, à peine voilée, de la politique de l’administration de Georges W. Bush avec ses mensonges et ses manipulation sur l’Irak entre autres. Warren Ellis s’engage donc politiquement et ce, ouvertement.
A travers cet évènement, le scénariste se demande jusqu’où peut aller un super-héros pour défendre le bien.

Cette entrée en matière choc plonge le lecteur dans l’intrigue immédiatement, pour ne jamais le lâcher. A titre personnel, je trouve que cette première scène est une des meilleures introductions que j’ai pu lire. J’ai été captivé dès les premières pages.

La suite est, elle aussi, excellente même si elle n’atteint pas le niveau d’excellence de ces premières pages. Mais en même temps, il aurait été difficile de garder un tel niveau sur tout l’ouvrage.

Pourtant la suite n’en est pas moins jouissive. Le scénariste arrive parfaitement à jongler entre présent et flashback nécessaires pour saisir toutes les nuances et détails du scénario.

Rapidement, le récit va s’accélérer. On fera la connaissance des autres armes et surtout de leur capacité de destruction. On verra rapidement qu’ils sont tous loin d’être lisses.

Les rebondissements sont superbement menés et captivent de bout en bout. Tout le développement de la trame se fait au gré de scènes d’actions hyper spectaculaires, violentes et superbement mises en scène. Je mets quiconque au défi de lâcher Black Summer une fois la lecture commencée.

La fin montre aussi que le scénario et les évènements sont maitrisés. Warren Ellis nous prouve que c’est un grand scénariste.

Les dialogues sont de qualité. C’est un récit palpitant, violent et jouissif.

Les personnages sont intéressants, particulièrement John Horus, Tom Noir et Frank Blacksmith. Les autres sont moins développés et possèdent moins de charisme. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’ils sont sans intérêt, loin de là. Leur passé et leur capacité, en tant qu’arme, pimentent le développement de l’intrigue.

Le graphisme de Juan Jose Ryp est très particulier et peut rebuter au premier abord. J’ai eu du mal à m’y faire au début. Pourtant le monsieur dessine plutôt bien avec beaucoup de détails, de dynamisme et d’expressivité. Le cadrage est de qualité et donne vraiment plus de « vie » au dessin.

Ce qui gêne de prime abord, c’est la propension à rajouter des centaines de détails par case. Il n’y quasiment aucun aplat dans le dessin. Tout est surchargé de détails. Cela peut donner une impression de planches très chargées. Cela parait parfois brouillon et le lecteur peut être perdu.

Mais, mon avis a évolué au cours de l’histoire. Il y a vraiment des planches sublimes. Le coté « brouillon » contribue finalement à donner un coté bestial et tendu. Ce style sied parfaitement aux scènes violentes où les membres arrachés volent dans tous les sens.

Une chose est sûre c’est que cette multitude de détails donne une personnalité à ce graphisme qui peut plaire mais aussi déplaire.

Pour conclure, j’ai adoré ce titre, c’est un coup de cœur. Le scénario est palpitant et on ne s’ennuie pas une seconde. La scène d’ouverture marquera les annales, mais le reste du tome n’est pas en reste. Warren Ellis apporte sa pierre à l’édifice dans ce mouvement de désacralisation du super-héros en proposant un comic profond, engagé, complexe et terriblement efficace. On en redemande!
Le graphisme de Juan Jose Ryp ne fera pas l’unanimité mais fait partie du charme se dégageant du titre.

Milady fait le parallèle avec Watchmen, avec qu’il partage quelques points communs. C’est assez gonflé. Même si l’œuvre mythique d’Alan Moore reste un cran au-dessus, Black Summer n’a pas à rougir de la comparaison. Mais le scénario de Watchmen est d’une complexité et d’une profondeur qu’il sera difficile d’atteindre de nouveau.

Vraiment ce Black Summer est une œuvre qui m’a emballée et que je recommande.
J’ai maintenant hâte de lire No Hero du même duo, chez le même éditeur.

Et vous qu’en avez-vous pensez? Partagez-vous mon enthousiasme? La première scène peut-elle devenir culte?

9 commentaires »

  1. tetram 15/06/2010 at 11:38 -

    Ca donne bien envie 🙂
    par contre il n’y a qu’un tome, ou c’est le tome 1 d’une longue série ?

  2. Kameyoko 15/06/2010 at 22:22 -

    @Tetram : Il n’y a bien qu’un tome avec un début et une fin. Raison de plus pour se jeter dessus. En plus, je n’ai plus le prix en tête mais c’est relativement un bon prix

  3. Kiwi Kid 17/06/2010 at 14:39 -

    J’avais trouvé la comparaison avec Watchmen vraiment gonflée: effectivement on retrouve quelques points communs, mais Watchmen a plusieurs niveaux de lectures là où BS n’en a qu’un seul. J’ai trouvé vraiment dommage que 60 à 70% du scénario tiennent dans les scènes de bastons quand on voit les quelques pages de réflexion ou de psychologies qui sont assez habiles. Ellis aurait du étendre son récit sur deux ou trois TPBs pour vraiment aller au fond des choses.

    Le dessin est en effet particulier. Les « petits points » font sale, je trouve.

    « No Hero » du même duo vient de sortir et à l’air plus aboutit.

  4. Kameyoko 18/06/2010 at 10:48 -

    @Kiwi Kid : Clairement c’est gonflé, mais c’est du marketing.

    On retrouve quelques thèmes de watchmen comme les super-héros à la retraite, un peu de la dimension politique, la manipulation… Mais il est en-dessous quand même.

    Justement, je ne pense pas qu’Ellis aurait du faire son récit sur plusieurs tomes. La force de Black Summer c’est qu’en un volume, il arrive à montrer et dire plein de chose.

    Pour le dessin, il faut clairement un temps d’adaptation. La sur-représentation des détails fait effectivement « sale » mais comme je le disais, à la fin, j’ai trouvé que ça donnait une sacré personnalité. Son trait est reconnaissable entre 1000.

    J’ai hâte de lire No Hero, que j’ai.

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